“Pumpkins are humorous objects that also fill people with warm intentions”.
Bienvenue dans Infinity Mirrors, une exposition à The Broad, musée d’art contemporain à Los Angeles, et consistant en une série d’installations réalisées par l’artiste japonaise Yayoi Kusama. Extrêmement populaire, l’exposition a voyagé de ville en ville à travers le monde et affiche complet en une poignée de minutes sitôt les billets en vente. Ayaka voulait y emmener ses étudiants, or on nous proposait déjà un forfait de quelques milliers de dollars pour pouvoir emmener un groupe d’étudiants en dehors des heures d’ouverture habituelles déjà complètes. Quelques billets ont été remis en vente à la fin du semestre et Rita, toujours au taquet, a réussi à en dégoter quelques uns pour notre petit groupe : cadeau de Noël pour les résidents de langues d’Oldenborg !
The Broad, un musée que je n’ai pas encore visité, mais dont on m’a toujours dit énormément de bien… L’exposition temporaire consiste en une série de salles alors nous n’avons pas du tout vu la collection permanente.Sans préambule, voilà à quoi ressemble l’oeuvre de Yayoi Kusama avec certainement sa pièce la plus célèbre, Infinity Mirrored Room – The Souls of Million Lights Years Away (2013). Vous l’aurez peut-être compris, le concept des Infinity Mirrored Rooms correspond à de petites salles dont les murs et le plafond sont faits de miroirs afin de donner l’impression que l’espace se démultiplie à l’infini.
Une composition à la mise en abîme intéressante : où est le vrai José ?
Dans la deuxième salle (une énorme sphère rose !), Dots Obsession – Love Transformed Into Dots (2007) montre bien la passion de l’artiste pour les pois.On n’entre pas dans cette oeuvre qui se trouve à côté de la salle présentée ci-dessus, mais c’est un des résultats que j’ai préférés !
« Walking on the Sea of Death », 1981.
« Blue Spots », 1965 (à gauche) et « Red Stripes », 1965 (à droite).
L’exposition est faite de six Infinity Mirrored Rooms ainsi qu’une collection d’oeuvres exposées entre chaque, pour mieux patienter et comprendre aussi la démarche de l’artiste. Pour être honnête, le système de visite est un peu perturbant, car nous avons l’impression d’être dans un parc d’attraction plus que dans un musée. Nous faisons la queue devant chaque salle en suivant un parcours et entrons trois par trois (sauf exception) dans la petite pièce où l’on limite notre temps de passage à trente secondes. Il est donc un peu dur de profiter pleinement de l’oeuvre et son invitation évidente à la contemplation, et de promouvoir une vision de l’art un peu éloignée de l’idée du « je-consomme-sans-réfléchir-et-je-veux-juste-ma-jolie-photo-sur-les-réseaux-sociaux »… Néanmoins, c’est aussi grâce à ce genre d’exposition que l’art contemporain ne se porte pas trop mal alors je tente de faire contre mauvaise fortune bon coeur.
Seule exception à la « règle de trois », nous avons eu le droit d’entrer à cinq et de profiter d’une minute entière dans Infinity Mirror Room – Phalli’s Field (1965). Il s’agit de la première Infinity Mirrored Room de l’artiste !Les Accumulations sont ces « sculptures molles » à base de poches de coton rembourrées de kapok et qui apparaissent dans plusieurs oeuvres de l’artiste. Des photographies montraient l’artiste s’allongeant nue dans la rue sur une surface recouverte de ces formes phalliques. Je vous avoue que je suis passée un peu à côté de l’idée « phallique », j’ai plutôt l’impression d’entrer dans un aquarium fantastique avec de drôles d’algues. Je ne sais pas s’il y a une revendication féministe ou provocante derrière ces oeuvres, mais dans chacune des oeuvres, je voyais des messages pas nécessairement joyeux, mais toujours pacifiques !
Le concept des Infinity Mirrored Rooms a commencé en 1965 sur ce qu’on nous décrit comme un coup de fatigue de la part de l’artiste : marre de répéter les motifs à la main (imaginez le nombre d’Accumulations nécessaires pour une simple toile !) sur des surfaces toujours trop petites, le jeu avec les miroirs s’impose comme un dispositif qui facilite grandement la démarche de l’artiste. Moralité de l’histoire : la fatigue a parfois du bon pour la créativité.
Tamara, à gauche, attend de voir la prochaine installation. Les jeux de miroirs sont toujours très amusants, car on ne sait plus trop où se trouve les modèles « originaux ».José semble avoir une révélation en plongeant la tête dans Love Forever (1966). Pour appuyer ce que je disais précédemment à propos du caractère pacifiste des oeuvres de Yayoi Kusama, le cartel indique que le concept derrière Love Forever est d’illustrer les droits civils, la libérations sexuelle, les mouvements anti-guerre et les groupes activistes des années 1960. Un peu hippie quoi…Il y a deux endroits où regarder dans cette oeuvre et vous pouvez voir Adan à droite, à gauche, en bas et un peu partout en fait. C’est assez impressionnant et les lumières changent de couleur : je saisis un peu mieux « l’illumination » de José.Infinity Mirrored Room – Aftermath of Obliteration of Eternity (2009). Cette pièce a probablement été ma favorite ! J’avais l’impression que nous avions complètement disparu dans cet infini et les lanternes aux lumières tremblotantes me rappellent certaines traditions orientales de lancers de lanternes en papiers…En fait, c’est un peu la même impression de poésie qu’en étudiant l’astronomie : on se sent tout petit, mais on accueille cette sensation avec beaucoup de tendresse parce que c’est également revigorant de contempler l’infini…A la demande de l’artiste, nous n’avons pas eu le droit de prendre des photographies de la dernière oeuvre, Infinity Mirrored Room – All the Eternal Love I have for The Pumpkins (2016), mais je pense que rien que le titre confirme le message de paix véhiculé par Yayoi Kusama. Des images officielles sont visibles par ici. Ci-dessus, il s’agit de Life (Repetitve Vision) (1998). Encore un titre évocateur pour une image assez poétique…My Eternal Soul est une série d’oeuvres (environ 500 !) commencée en 2009.Malgré les couleurs vives et contrastées, ce n’est pas forcément joyeux, ce n’est pas triste non plus et cela ne laisse pas indifférent. Difficile de mettre des mots sur cette ambiguïté.La dernière salle, The Obliteration Room, propose un drôle de concept…C’est une salle complètement blanche, et chaque visiteur se voit donner une planche de stickers colorés (des pois, bien évidemment) qu’il doit coller là où il le souhaite.Bon, normalement, coller le sticker sur les gens ne compte pas !Une chaise et un vélo qui ont presque disparu sous les pois colorés.J’ai pris cette photo un peu à la va-vite, pourtant j’avais vraiment envie de partager ce petit bout de phrase et de montrer aussi le drôle de personnage qu’est Yayoi Kusama…